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Sparring à vitesse lente de l'art martial russe

18/9/2013

 
Sparring à vitesse lente de l'art martial russe

Arthur Sennot

Une des plus importante et spécifique méthode d'entraînement du Systema est l'utilisation du sparring au ralenti. Ce jeu de sparring est probablement le principal dispositif d'entraînement physique pour nous rendre apte au combat, puisqu'il nous permet d'intégrer nos compétences individuelles, tout en apprenant à les utiliser en coordination avec un adversaire. C'est un outil d'entraînement incroyablement utile et puissant, mais comme n'importe quel autre dispositif d'entraînement, d'exercice ou de formation, il doit être exécuté correctement afin d'inculquer les compétences et capacités désirées. Bien que le jeu susmentionné soit pratiqué au ralenti, il possède plusieurs caractéristiques qui peuvent mettre en difficulté les débutants. La plupart des difficultés proviennent non pas de l'incapacité à jouer le jeu, mais de l'incompréhension de ses principes et ses buts. Cet article éclaircira ce sujet et examinera les principales clefs pour une utilisation correcte du sparring au ralenti. La base La base du Sparring au ralenti est de créer un environnement où tous les aspects techniques du combat à mains nues peuvent être étudiés pratiquement sans dangers, tout en fournissant au corps la possibilité d'exécuter et de cultiver une véritable spontanéité. Pour faciliter ceci, le sparring doit être considéré comme un combat vu au ralenti.

Les pratiquants doivent oublier qu'ils sont au ralenti, les mouvements et les réactions doivent être réalisés comme s'ils bougeaient à pleine vitesse. Cela requiert une certaine dose de jeu d'acteur de la part des participants. Cependant, il est important de comprendre que ce jeu d'acteur, en comparaison avec le jeu classique et oral, crée plus de réalisme. Quand on bouge à vitesse lente, les mouvements et l'équilibre diffèrent de ce qu'ils sont à pleine vitesse. C'est évident pour toute personne qui a déjà conduit une voiture. Un virage serré qui peut être abordé sans problème à 50 km/h va sûrement retourner la voiture à 130km/h. Ce qui vaut pour les voitures s'applique aussi aux humains. Durant le sparring à vitesse lente nous devons toujours garder cela en tête et bouger « comme si » nous étions à pleine vitesse. Tous les mouvements devront être exécutés comme si vous étiez sur une cassette vidéo à vitesse normale, mais jouée au ralenti. Restez vous même Au cours de n'importe quel type d'entraînement, qu'il soit à pleine vitesse ou au ralenti, il est essentiel de rester soi-même, tout en respectant les règles du jeu. Vous devez attaquer comme si c'était totalement vrai. Vous devez agir avec l'intention de réellement frapper votre partenaire. Vous devez aller jusqu'au bout en essayant de mettre de la puissance dans votre coup. Vous devez accomplir les mêmes actions physiques et mentales que vous feriez en étant déterminé à blesser votre adversaire.

Il existe une tendance naturelle à vouloir aider son partenaire. En soit c'est bien, mais malheureusement cela peut mener à plusieurs comportements qui seront des obstacles à l'entraînement. En vue d'aider inconsciemment son partenaire, les pratiquants frappent souvent à coté de la cible ou bien ne vont pas au bout de leur geste. Bien que cela aide son partenaire à éviter les coups durant l'entraînement, cela ne lui apprendra pas à se défendre. Toutes les attaques doivent être précises, avec de l'intention et menées jusqu'à leur terme. Si la sécurité est inquiétante, alors on peut abaisser la vitesse d'exécution pour garantir un meilleur contrôle de la sécurité.

En opposition au besoin inconscient d'aider son partenaire, il existe une tendance complémentaire et une envie profonde de le contrecarrer. Vous devez être conscient de ce fait. Souvenez-vous, le rôle de l'attaquant est de jouer un adversaire qui veut blesser le défenseur. L'intention d'attaquer et l'intention de contrecarrer sont deux choses très différentes. Chacune de ces intentions crée son propre déroulement d'actions et de relations. Soyez sûr de donner la bonne intention à votre partenaire en fonction de l'exercice que vous pratiquez. Tromper la physique 1 Augmenter la vitesse d'une attaque est une feinte répandue à laquelle les gens ont recours inconsciemment. Cela peut apparemment faire des ravages sur le défenseur, et donne l'illusion du succès à l'attaquant. Bien sûr il n'a pas réussi quoique ce soit, mais il s'est simplement berné et a sapé la confiance de son partenaire.

On ne peut pas augmenter sa vitesse maximum. Aussi lorsque l'on s'entraîne au ralenti, on doit conserver la même allure tout au long de son mouvement. Si l'attaquant bougeait à pleine vitesse il ne pourrait pas soudainement accélérer la vitesse de son attaque. Cette manoeuvre n'existe pas à vitesse réelle par conséquent elle doit être proscrite au ralenti.

En outre, bouger rapidement et ralentir brutalement n'est pas plus réaliste. Cela produit les mêmes problèmes dans le sparring au ralenti et ne fait que ralentir les progrès.

Il doit être remarqué que dans un combat à vitesse réelle, il existe des moyens de changer la vitesse de votre attaque, mais ce sont des techniques particulières qui n'ont rien à voir avec simplement profiter du rythme ralenti. A un niveau plus avancé, on peut demander aux pratiquants d'utiliser le changement de rythme mais cela est toujours fait en accord avec les lois de la physique telles qu'elles s'appliquent pour les mouvements à pleine vitesse. Tromper la physique 2 En plus des simples changements d'allure, une autre erreur fréquente est le changement de trajectoire irréaliste. Souvenez vous que notre règle est « tout ce qui se passe au ralenti doit être réaliste ». Ainsi tout changement de ligne d'attaque faite par un pratiquant doit être réalisable à pleine vitesse.

Alors qu'au ralenti, il est théoriquement possible pour moi de débuter mon mouvement sur un plan le long d'une trajectoire précise et de changer radicalement et brutalement de direction, approximativement un effet de zig zag. Cela peut créer une feinte ou un mouvement d'intimidation. Cependant un tel mouvement n'est pas compatible avec les lois qui régissent la vitesse rapide. Par conséquent il ne doit pas apparaître durant le sparring au ralenti.

A pleine vitesse, on devrait utiliser des chemins elliptiques pour changer la direction d'un coup. Pour que notre jeu soit bénéfique, les mêmes limitations doivent être incorporées aux mouvements au ralenti. En d'autres termes, nous devons agir comme s'il était impossible de bouger en zig zag. Lors de l'entraînement au ralenti, tout doit ressembler à ce que vous pouvez faire en réalité. Sinon ce sont de mauvaises habitudes d'entraînement qui induisent en erreur votre partenaire et vous-même. Tromper la physique 3 La dernière duperie qui apparaît fréquemment, c'est le défenseur qui bouge plus rapidement que l'attaquant. Au cours du sparring au ralenti il est très facile de simplement bouger plus vite que votre attaquant. Après tout il bouge au ralenti. Cependant, en faisant ceci, vous profitez juste de la part artificielle du jeu et vous le rendez du même coup inopérant. La réalité est que beaucoup de vrais adversaires peuvent être et seront probablement plus rapide que vous. Construire votre pratique autour de l'idée d'être plus rapide que votre adversaire servira seulement à réduire vos chances d'utiliser votre art dans une véritable confrontation. Nous devons toujours nous entraîner à battre un adversaire supérieur, et donc nous entraîner d'une façon qui considère que nos opposants ont de meilleures capacités et aptitudes au combat que les nôtres.

Par conséquent, si l'attaquant commence à une vitesse d'escargot et bien le défenseur doit réagir à une vitesse d'escargot voire plus lentement. S'il bouge à pleine vitesse, je bougerai à pleine vitesse et je n'aurai aucune réserve d'accélération pour gérer son attaque. Gardez en tête que « vous ne pouvez aller plus vite que votre vitesse maximum ».

Ainsi, votre pratique ne doit pas être axée sur la vitesse mais sur les angles, la sensibilité et la compréhension des capacités de votre adversaire. Si je peux me défendre contre lui quelque soit sa vitesse, et que je suis capable de me déplacer lentement lorsqu'il m'attaque, dans ce cas peu importe la rapidité de mon adversaire, je serai en mesure de me défendre. Le mouvement lent est une béquille d'entraînement Au cours des entraînements, une des premières choses que nous souhaitons est de bouger à une vitesse à laquelle nous pouvons apprendre. Durant l'apprentissage nous voulons apprendre de nouvelles choses et développer de nouveaux talents. Nous ne souhaitons pas seulement réassimiler des choses que nous connaissons déjà. Ceci est particulièrement important pour ceux qui ont une expérience martiale préalable au Systema.

A chaque fois que vous pratiquez n'importe quel type d'entraînement libre, il est toujours facile de retomber dans ses habitudes, vers ce que l'on connait déjà. Si ceci arrive durant un cours de Systema, alors vous pratiquerez seulement votre art précédent. Les cours de Systema sont dédiés évidemment à l'apprentissage et la pratique du Systema. Donc, nous devons être sûr de pratiquer du Systema.

Cela est possible en ralentissant suffisamment, ainsi votre stress n'entre pas en action. Vous avez besoin de vous entraîner seulement à une vitesse qui provoque des réponses Systema. Dès qu'apparaissent des réactions Non Systema vous bougez trop rapidement pour faire des progrès. A partir de ce moment vous n'apprenez plus et vous ne vous entraînez plus. Il est indispensable de déterminer ce moment et de ralentir immédiatement à un niveau auquel vous pouvez réellement vous entraîner.

Au fond nous voulons atteindre ce qui est connu sous le nom «the state of flow » c'est-à-dire être présent. Cet état est une zone dans laquelle on expérimente un état de conscience et d'émotion optimum. Lorsque l'on est présent les capacités d'apprentissage sont optimisées, les résultats sont optimisés et la joie qui découle de l'activité est ressentie. D'après Mihaly Csikszentmihalyi, le père de la théorie du « Flow », la tâche doit être suffisamment facile pour être accomplie correctement, mais suffisamment difficile pour demander de la concentration et de l'effort. Plus l'écart entre ces deux critères est ténu plus l'expérience d'être présent sera limpide et puissante. Ce petit écart est l'endroit où se situe le meilleur entraînement et par conséquent c'est aussi l'état que vous devez viser pour pratiquer le jeu du sparring au ralenti. Le mouvement au ralenti améliore la vision En complément de l'entraînement à un rythme où apparaissent des réponses Systema, vous devez vous entraîner à une vitesse à laquelle vous produisez de nouvelles réponses Systema. Si vous faites toujours le même mouvement en réponse à une attaque donnée, c'est qu'il faut ralentir encore. Si vous reprenez constamment le même genre de mouvement c'est que vous n'êtes plus créatif et spontané, vous vous raccrochez à des techniques et donc vous ne faites plus du Systema.

Il est important que vous vous entraîniez d'une façon qui vous permet de voir en permanence de nouvelles opportunités. Apprendre à voir les opportunités est une des choses qui vous permettra de constamment improviser et de vous adapter, vous rendra capable de gérer n'importe quelle situation créée par un adversaire.

A chaque fois qu'un coup arrive, travaillez suffisamment lentement pour voir comment votre partenaire est en déséquilibre, comment il peut résister, quelle attaque peut-il enchaîner. Donnez-vous la possibilité de voir ce que vous pouvez faire pour l'amener au sol ou localiser l'endroit pour le frapper sans qu'il puisse se défendre. En travaillant de cette façon vous obtiendrez et verrez des progrès. Vous deviendrez meilleur et vous gagnerez de nouvelles aptitudes.

Si vous travaillez plus rapidement, au mieux tout ce que vous obtiendrez sera de rigidifier vos capacités, réactions et peurs que vous possédez déjà. Dans le pire des cas vous vous rendrez encore moins efficace. Ne laissez pas votre entraînement vous conduire à la régression plutôt que vers la progression.

Copyright Arthur Sennot, 2000

Traduction Olivier David

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